La colline éternelle

 

Vezelay est, dans l'Yonne, un chef lieu de canton de l'arrondissement d'Avalon (environ 500 habitants).
Altitude 302 m.
Latitude 47°28' Nord
Longitude 3°44' Est

Le jour de Pâques 1146, Bernard de Clairvaux prêcha la deuxième croisade à Vézelay.

L'histoire
Bien qu'on puisse faire remonter son origine à 858, quand Girart de Roussillon (celui de la geste) et sa femme Berthe fondèrent un monastère au bord de la Cure, la renommée de Vézelay ne s'étendit qu'au début du XIème siècle, quand on commença à parler des reliques de Sainte Marie de Magdala. Le 27 avril 1050, la bulle du pape Léon IX consacra l'abbaye à Sainte Marie Madeleine. Le pèlerinage du 22 juillet attira alors des foules considérables. C'était aussi une étape importante pour les pèlerins allemands et lorrains sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle. Jaloux de l'indépendance de l'abbaye, les comtes de Nevers, l'évêque d'Autun, multiplièrent les querelles et encouragèrent les révoltes des habitants. En 1103, le pape Pascal II leva l'interdit qu'avait jeté l'évêque d'Autun sur les pèlerinages mais contraignit l'abbaye à reconnaître l'autorité spirituelle de Cluny.
De 1096 à 1104, l'abbé Artaud fit construire le chœur roman. Le 22 juillet 1120, après un gigantesque incendie qui ravagea la nef primitive, Renaud de Semur commença la construction de la nef actuelle. En 1140, Ponce de Montboissier acheva la nef et fit élever le narthex entre 1145 et 1150.
Le jour de Pâques 1146, à la demande du pape Eugène III, saint Bernard de Clairvaux prêcha la seconde croisade à l'endroit où est élevée la chapelle Sainte-Croix. En 1162, une bulle pontificale leva la dépendance à l'égard de Cluny. En 1166, Thomas Beckett, archevêque de Cantorbéry, prononça la condamnation solennelle du roi Henri II.
De 1185 à 1190, Girard d'Arcy, construisit le chœur et le transept gothiques.
En juillet 1190, Richard Cœur de Lion et Philippe-Auguste se retrouvèrent à Vézelay pour le départ de la IIIème croisade.
En 1217, des compagnons de François d'Assise fondèrent, la Cordelle, premier couvent franciscain de France. Entre 1244 et 1270, Saint Louis fit de nombreux pèlerinages à Vézelay. En 1260, La tour Saint-Michel et le fronton de la façade furent édifiés.
La bataille autour des reliques de Marie Madeleine fut sans pitié, les moines n'hésitant pas à créer de faux documents (légende de Badilon, substitution du cadavre de Marie Madeleine) pour prouver leur bonne foi. Saint Louis authentifia les reliques de la Sainte de Vézelay et les fit exposer le 24 avril 1267 mais le 9 décembre 1279, la "découverte" des "vraies" reliques à Saint Maximin en Provence marqua le début de la fin ... L'abbaye était en ruines quand sa restauration fut entreprise par Viollet-le-Duc en 1840. Elle fut érigée en basilique en 1920.
La Madeleine
Toutes les parties supérieures sont du XIIème siècle (la crypte de 19 m de long sur 9,20 m de large qui s'étend sous le chœur est de l'époque carolingienne), pourtant, elles ne sont pas entièrement romane.
Si le narthex (22 m de long, 23,50 m de large, 19,50 m de haut) et la nef (62,50 m de long, 18,55 m de haut) comptent parmi les chefs-d'œuvre de l'architecture romane (les arcs doubleaux en plein cintre sont constitués de claveaux de pierre blanche et brune), l'édifice s'achève par un vaste chœur gothique primitif construit en 1185, alors qu'aucune des grandes cathédrales n'était encore achevée.
Construite de 1120 à 1140, la nef romane est prolongée vers 1145 par les trois travées du narthex, plaquées sur sa façade. Les deux constructions sont semblables, même si des arcs brisés, pas encore gothiques, apparaissent.
Vers 1185, un nouveau chœur, remplace un chœur roman primitif. Le choix est audacieux car les bâtisseurs ont peu d'expérience de cette technique nouvelle. Ils avaient pourtant utilisé la voûte d'arête sur le vaisseau central alors qu'on la réservait généralement aux bas-côtés, plus étroits. Ils purent ainsi, en allégeant un peu les murs de chaque travée, ouvrir des fenêtres plus grandes que dans la plupart des églises romanes. Pour gérer l'énorme poids d'une voûte de pierre, on avait eu l'idée de réunir les deux murs de la nef par des chaînes dont on voit encore les crochets pris dans la maçonnerie. Les arcs-boutants n'existaient pas encore. Le gothique, en dirigeant le poids de la voûte sur la croisée des ogives et la poussée des ogives sur les piliers, apporta la solution. N'ayant plus de fonction de soutien, les murs s'ouvrirent et s'allégèrent. Ainsi, de la légère pénombre du narthex au chœur inondé de lumière, l'église est un "chemin de lumière". En juxtaposant les deux styles, les moines de Vézelay posaient sur la colline bourguignonne, leur foi en la lumière, l'avenir et la spiritualité.
Les piliers de la nef comme ceux du narthex sont ornés de chapiteaux différents (le "Moulin mystique" résume toute la Bible !). Remarquables aussi sont les tympans du narthex que domine le Christ en gloire du portail central.
Les Croisades
La IIème Croisade fut provoquée par la chute d'Édesse en 1145. Prêchée le 31 mars 1146 à Vézelay par Bernard de Clairvaux, elle fut conduite en décembre 1146 par Louis VII (et Aliénor) et Conrad III. Manuel 1er Comnène ayant refusé son aide aux Croisés, la traversée du sultanat de Roum fut difficile. Arrivés en Terre Sainte, certains croisés repartirent aussitôt pour l'Europe, tandis que les deux souverains se laissaient entraîner dans une expédition inutile contre Damas. La seconde croisade s'acheva en 1149 sans aucun résultat.
La IIIème Croisade fut provoquée par la chute de Jérusalem en 1187. Dès 1188, l'empereur Frédéric 1er Barberousse prit la route à la tête d'une puissante armée (au moins 20 000 chevaliers). Mais après sa victoire sur les Turcs à Iconium en mai 1190, Frédéric se noya en traversant le Selef. L'armée se dispersa et quelques centaines de chevaliers seulement participèrent avec Frédéric de Souabe au siège d'Acre.
Ce n'est qu'en 1190 que Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion quittèrent Vézelay et hivernèrent en Sicile. L'arrivée de Philippe puis de Richard, fit aboutir le siège d'Acre qui durait depuis deux ans. La ville se rendit le 12 juillet 1191. Philippe Auguste regagna la France et Richard resta seul chef de la croisade.