Revoilà Antoine Charaix ! Toujours d'Elze
mais maintenant maçon. Le 4 mai 1615 il sort de sa bourse quatre-vingt
livres pour Mathieu Folcher de Naves, certainement parent
de la future belle-maman.
Pierre Fustier de Langlade de Gravières
fils de Pierre a épousé Jeanne Jallet fille de François. De la dot fixée par le contrat,
François Jallet verse cent livres au père
du marié le 25 janvier 1616 "et lesdites cent livres ledit Fustier
reconnaît à ladite Jallette sa belle-fille sur tous et chacun ses biens présents
et avenir aux fins que s'il y a lieu de restitution icelle lui puisse être assurée
et restituée tout ainsi et en la forme et manière que se porte par ledit mariage"
et le 18 février 1617 le solde de "cinquante livres et une robe
nuptiale drap de couleur à l'usage de Jehanne Jallet fille dudit François et
femme d'autre Pierre Fustier fils du susdit le tout reçu savoir ladite robe
réellement ci-devant et ladite somme de cinquante livres ici réellement en écus
sol, écus d'Espagne et d'Italie, seizains et autre monnaie le tout pour reste
entier paiement et plénière subrogation de tout le dot et verchère jadis constitué
par ledit François Jallet à ladite Jehanne sa fille". Pourtant, le
12 mai 1631, Antoine Charaix est condamné à donner à sa
belle-sœur Jeanne une robe "telle qu'est
désignée en un oblige par moi reçu consenti par ledit Charaix au profit dudit
Fustier ou de sadite femme qu'il dit avoir perdue que dépendait des restes de
dot d'icelle". Quinze ans après ! La robe dut probablement subir quelques
retouches.
Attention ! "Sachent tous présents et avenir que l'an mil six cent
quinze et le quatorzième jour du mois de juillet après midi reignant très chrétien
prince Louis par la grâce de dieu roi de France et de Navarre en présence de
moi notaire royal et des témoins bas nommés comme sont" "en
l'honneur de dieu et en multiplication du genre humain, par parole de futur,
mariage a été traité lequel si plaît à dieu soit fait et accompli en l'église
catholique apostolique et romaine et suivant la loi d'icelle par et entre mr
Antoine Charays maçon natif d'Elze paroisse de Malons d'un côté et Françoise
Jallette fille naturelle et légitime de François Jallet et de Marye Folchier
du lieu des Sabatiers de Conchays paroisse des Salelles du diocèse de Viviers
d'autre lesquelles parties étant ici présentes et personnellement établies ont
promis et juré ledit mariage et de icelui accomplir et solenniser en ladite
église à la première volonté et réquisition de l'un d'iceux savoir ledit Charays
avec le conseil et avis de Jehan Crégut dit Pincel dudit lieu d'Elze et ladite
Jallette avec le conseil et avis de sesdits père et mère" "ledit
François Jallet sera tenu comme a promis et promet devoir quitter céder et remettre
à ladite Françoise sa fille tout ainsi que dés à présent par vertu et manière
dudit présent contrat de mariage et en faveur d'icelui leur quitte cède et remet
ores et à jamais purement et irrévocablement à ladite Françoise Jallette sadite
fille présente stipulant et humblement remerciant la moitié entière de tous
et chacun ses biens droits noms et actions meubles immeubles présents et avenir
où que soient en quoi que consistent ou que puissent consister et être dits
établis et nommés et ce avec toutes leurs charges honneurs droits libertés facultés
passages et obéissances pour desdits biens devant faire user et disposer à tous
ses plaisirs et volontés tant à la vie que à la mort" "ledit
mr Anthoine Charays sera tenu comme a promis et promet bailler audit Jallet
son beau-père en dot et par manière de constitution de dot la somme de sept
cents livres tournois aussi une brassière de cadis de couleur à l'usage de Marie
Folchier femme dudit François autres deux robes à l'usage l'une de Jehanne l'autre
de Marye Jallettes sœurs de Françoise aussi trois doublons d'or espagne savoir
deux à Pierre et l'autre à Jacques Jallets frères de Françoise deux cartals
de blé froment deux moutons gras un quintal chair de boeuf cuit et de plus un
lit garni de deux linceuls deux couvertes marchandes laine de mouton pelée avec
telle autre garniture que bon lui semblera". Les témoins de ce document
exceptionnel sont Cristet Durant de Mirandol, Pierre
Crégut d'Elze fils de Jean, Antoine Merle d'Elze,
Guilhaume Chastanet d'Alauzas, Jean Privat de Montachard,
Mathieu et Claude Folchier frères de Naves. Sourions
à la date du 14 juillet, notons que si la présence d'un frère utérin d'Antoine (Jean Crégut) est signalée celle de ses
parents ne l'est pas, et retenons que c'est le marié qui paie la dot.
Et le 7 novembre
1615, Antoine Charaix fils de feu Antoine d'Elze
(le curé nomme le père mais pas la mère) épouse, en l'église des
Salelles, Françoise Jallet fille de François et Marie Folchier du Conchaix.
Des sept cents livres dues à François Jallet, trois cent quarante deux
livres "compris et inclus tous autres paiements précédants mis en fournitures
d'argent et autres choses que ledit Charaix peut avoir faites fournies et avancées
pour lui suivant leur compte qu'ils en ont fait ici en notre présence"
sont déduites le 9 février 1616, quatre vingt sept livres le 18 février
1617 "outre autres quittances que ledit Jallet reconnaît audit Charays
sur tous ses biens comme est contenu au contrat de son mariage y compris et
inclus toute fourniture et avance de du et d'avoir que ledit Charaix aurait
fourni et avancé pour ledit Jallet jusqu'à présent suivant le compte entre iceux
fait en ma présence" et le reste m'a échappé ou n'a jamais été payé.
Le 16 janvier
1618, François Jallet emprunte trente livres à "Jehanne
Domergue fille à feu Pierre du lieu de Salveplane par nécessité habitante à
présent à la paroisse des Salelles" qu'il "a promis et promet
payer rendre et satisfaire à ladite Domergue le jour et fête de Noël prochain".
La cancellation de cette obligation est faite par Antoine Charaix le 2 mai 1627 et, étrangement,
répétée le 14 mai devant des témoins différents. Les prêts d'argent sont
parfois garantis par l'engagement d'une pièce de terre mais très souvent ils
ne comportent aucune clause relative au revenu de l'argent prêté. De même, lorsqu'ils
ne sont pas obtenus à la suite d'une action de justice, les remboursements parfois
très tardifs ne sont apparemment pas assortis de pénalités. Il est vrai que
l'église d'alors interdit radicalement le prêt usuraire et menace des foudres
sacrées ceux qui le pratiquent laissant ainsi le champs libre aux banquiers
juifs et lombards. Le cercle familial lorsqu'il est sollicité, n'exige de l'emprunteur,
outre le remboursement de la somme prêtée, que des services en natures qui maintiennent
la stabilité dans l'escarcelle communautaire des escus d'or au soleil, pistoles
et doublons d'Espaigne ou d'Italie, francs de Roy, quarts d'écu, testons, ducats,
douzains, sizains et autres bonnes monnoyes. Les dates d'échéance sont généralement
désignées par les fêtes du calendrier grégorien. Bien entendu, on rencontre
des dates classiques comme le dernier jour du mois de mai prochain, le second
jour du mois de février, des durées comme "d'huy en un an prochain",
mais la grosse côte est tenue par Noël, Saint Michel, Pâques et aussi La Madeleine,
Saint André, Saint Antoine (cette dernière portant peut-être une connotation
familiale).
En
dépit de sa paternité toute récente, François Jallet doutant de sa santé ajuste
les détails de sa succession dans son testament du 9 février 1616. "Remettant
ses obsèques et funérailles à la disposition de son héritier ou héritière bas
nommé sauf qu'il ordonne que faisant icelles le jour de sa sépulture, neuvaine
et chef de l'an soient appelées et commises quatre prières ou davantage le plus
à ladite discrétion de son héritier ou héritière bas nommé", il destine
trois cents livres à Pierre, Jeanne et Marie ses enfants à marier, "audit
Pierre l'apprentissage d'un état tel que à icelui plaira d'apprendre jusqu'à
un montant de trente livres et si ledit apprentissage excédait ledit prix de
trente livres ledit testateur veut que soit par lui payé" "et
auxdites Jehanne et Marye Jallet les lègue aussi de plus à une chacune d'elles
une robe drap de cadis couleur que leur plaira pour leur être payée lors de
leur mariage", rend son augment à sa femme Marie Folchier et cite sa fille Jeanne épouse de Pierre Fustier
de Langlade. Il institue son héritière universelle sa
fille Françoise femme d'Antoine Charaix (alors qu'il existe au moins
un héritier mâle) tout en envisageant la possibilité d'un retour de l'héritage
vers sa famille "si ladite Françoise venait à décéder sans enfant naturel
et légitime a substitué et substitue audit héritage ladite Jehanne légataire
n'étant mariée et si elle était mariée ou décédant audit cas sans enfant naturels
et légitimes a substitué audit héritage ledit Pierre et après ledit Pierre décédant
en semblable cas substitue audit héritage ladite Marye n'étant aussi mariée
ou icelle décédant aux semblables cas que dit estre a substitué audit héritage
Mr Jacques Jallet marchand cardeur son frère habitant des Vans pour en faire
et disposer à ses volontés le préférant quand à ce auxdites filles n'étant icelles
mariées et non autrement". Les pauvres n'attendront pas très longtemps
la distribution gratuite du blé seigle promis. En 1618, François Jallet ira rejoindre dans leur tombeau
du cimetière des Salelles ses devanciers et prédécesseurs.
En 1617, la camarde
fauche d'un seul geste Antoine et Louis Jallet, frères de François. Leur noyade dans le Rhône
marque la fin des Jallet du Conchaix.
Le 17 avril 1618 à lieu une réunion
de conciliation entre Jacques Jallet, fils de Louis, cardeur des
Vans et les époux Charaix héritiers de François Jallet. Jacques Jallet n'a encore rien perçu de
ses droits légitimes sur les biens de ses père et mère ni de l'héritage de son
frère Louis décédé sans héritier. Louis
Jallet père étant mort en 1614, Louis
Jallet fils et son frère Antoine en 1617, il semble clair
que le François ne les lâchait pas facilement.
Le demandeur évalue ses droits maternels à trois cents livres "par moyen
de la descente qu'a été faite de celle dudit feu Antoine que fut submergé en
la rivière de Rosne avec ledit Louis son frère et après icelui Antoine se trouvant
fort endetté lors de son décès ses créanciers firent discuter la légitime d'icelui",
ses droits paternels à plus de deux cent cinquante livres "outre que
ledit feu autre Louis Jallet son père lors de son mariage aurait perçu une grande
somme d'argent que lui fut reconnue par feu Yllaire Sabatier son beau-père et
aïeul dudit Jacques aurait icelui fait des acquisition par force légitime pendant
son mariage revenant le tout à plus de trois mille livres", la succession
de son frère Louis à soixante livres "outre
que les fruits desdites légitimes lui sont dus depuis le décès de sondit feu
père que sont trois ans ou environ que reviendraient lesdits fruits à plus de
vingt livres tous les ans". Il n'oublie pas de signaler que son frère
François dans sa grande bonté lui à
laissé dix livres par testament. Soit un total supérieur à six cents livres
et ma parole j'y perds ! Le compte n'est pas bon ! s'écrient Antoine Charaix et sa femme Françoise. La légitime "dudit
feu Antoine Jallet ne doit et ne peut de droit servir à la liquidation des légitimes
d'icelui Jacques ni moins à celle dudit feu Louis pour autant que icelle a été
mise aux enchères et y avait certains voisins qui par inimitié ou autre considération
ont surdit à icelle et icelui voyant que ladite légitime avait été départie
du propre domaine dudit François Jallet son beau-père et aux fins que ladite
métairie et domaine demeurât en son entier il y aurait surdit à plus de cent
livres outre la valeur d'icelle et touches données lui en serait demeuré".
Antoine Charaix rappelle que Louis le père avait légué trois
cent livres à Jacques dans son testament, que François son beau-père lui gardait
soixante livres sur la succession de Louis le fils, qu'il n'est pas
"tenu à autre restitution de fruits pour autant que ledit Jacques Jallet
depuis le décès dudit feu Louis son père est toujours allé et venu, mange, bois
et a eu l'habitude de la maison aussi bien qu'auparavant et y a fait toute sorte
de trafic et négoce", soit avec les dix livres du testament un total
de trois cent soixante dix livres, et t'as qu'à tendre la main pour les avoir
! Le conciliateur propose à chacune des parties de s'entendre "de son
bon gré pur et franc vouloir pour eux et les leurs à l'avenir de tous leursdits
différents, question, litige et controverse entre eux au trait de leursdits
parents et amis ici présents ont amiablement convenu transigé et accordé comme
par vertu et manière de l'à présent contrat transigent conviennent et accordent
en la forme et manière que s'ensuit mutuelles valables et réciproques stipulations
et acceptation d'un côté et d'autre" sur la somme de quatre cent quinze
livres payables très rapidement. C'est exactement ce que je disais ! s'exclament
les parties naguère antagonistes, on se tombe dans les bras, on s'embrasse,
"Ah mon tonton", "Oh ma Fanchon" et la réconciliation sera
sincère et durable puisque certains actes familiaux seront signés dans les maisons
successives que Jacques habitera aux
Vans et qu'il sera même cité comme témoin du testament d'Antoine en 1640. A la suite de quoi
"ledit Jallet s'est démis dévêtu et dépouillé" de ses droits
sur l'héritage de Françoise "et en a investi ledit
Charays par le bail de ma plume avec promesse de les lui faire avoir valoir
tenir jouir posséder entretenir et garantir envers et contre tous qu'il appartiendra
et a consenti et consent que ledit Charays prenne ladite possession réelle et
actuelle quand bon lui semblera et jusque ce fait confesse le tenir de lui en
nom de l'état de précaire et non autrement les posséder et pour mieux observer
les choses susdites icelles tenir garder et observer sans jamais en rien y contrevenir
lesdites parties respectivement comme les touche et conserve l'un envers l'autre
ont obligé tous et chacun leurs biens et par expresse ledit Charaix sa personne
propre aux cours de monsieur le sénéchal présidial et conventions royaux de
Nîmes royale d'Uzès usage ordinaire des parties chacune d'elle ainsi l'ont promis
et juré sur lequel jurement ont renoncé à tout droit et action civil canon et
autre par lequel pourrait venir au contraire des choses susdites desquelles
chacune partie n'en a demandé instance". Les remboursements ne traînent
pas, cent trente deux livres "sur et tant moins et en déduction et diminution
de plus grande somme" le 7 mai 1618, septante une livres le
9 juin 1618 aux Vans "boutique de Jehan
Sabel écuyer tenue par ledit Jallet", cent livres "en pistoles
d'Espagne et d'Italie ducats sols et autre monnaie tous comptés nombrés retirés
et emboursés en notre présence" le 6 avril 1619 et cent quinze
livres "pour parfait et entier paiement de plus grande somme contenue
en certain contrat de transaction jadis passé entre lesdites parties à raison
des biens et droits de légitime paternels maternels supplément d'iceux et droit
de succession dudit Jacques Jallet sur les biens de ses feus père et mère et
de feu Louis Jallet son frère" le 2 mars 1620 ce qui fait quatre
cent dix-huit livres !
En complément des cash flows familiaux, il faut trouver de l'argent
pour honorer la créance Jallet, payer les dots des filles et maintenir le patrimoine
foncier. Le 4 août 1618, Antoine Charaix paye trente livres à Jean
Feyssel de Luminières, le 15 juin 1619 c'est
soixante livres dont il promet "faire paiement audit d'hui en un an
prochain" à Antoine Guas de Seyras et encore
vingt livres le 19 juin 1620 au même Guas qui n'a apparemment pas de
craintes pour le prêt précédent. C'est la première fois, mais le fait se reproduira,
qu'Antoine Charaix est appelé Planiol dans un
acte. S'agit-il d'un surnom ou d'une parenté ? L'acte étant passé avant midi,
il est peu probable que le vin de clinton ou de jacquet ait provoqué dans les
esprits les désordres dont on le sait capable d'autant que nous sommes au mois
de juin et qu'il doit commencer à piquer. Ce n'est pourtant que le 23 août
1625 que Jean Guas, délégataire de son frère, reverra ses quatre-vingts
livres.
Par
décision de justice; Antoine Charaix a hérité d'Antoine Jallet une vigne appelée la Sablone.
A cette époque sans cadastre, chaque pièce de terre porte un nom et ses confronts
sont définis par les propriétaires voisins, les chemins, les valats. Dans les
descriptions, le marin désigne le Sud, l'aure droite (le mistral) le Nord, le
levant l'Est, le couchant l'Ouest. Le pied et le chef font référence à la pente
du terrain. Le maître du sol, hobereau local, grand seigneur ou congrégation
religieuse touche, sur chaque changement de propriétaire, une redevance d'environ
un dixième du prix payé, c'est le droit de lodz et vente, successeur moderne
de la mainmorte. "Haut et puissant seigneur messire Jacques Grimoard
de Bernoye comte du Roure seigneur et baron des baronnies de Barjac, Grijac,
Verfuel, Saint Florent, Banne, coseigneur du mandement de Naves et autres plaisirs"
ayant eu vent d'un transfert de propriété s'empresse d'exiger son dû le 13
juillet 1620 "et moyennant c'est démis de ladite pièce et en a investi
ledit Charays par le bail de ma plume avec promesse de la lui faire valoir et
tenir sous ladite directe lui en être d'éviction et garantie devant tous qu'il
appartiendra et ledit Charaix promet la tenir sous icelle le reconnaître toutefois
et quand que requis en sera payer les droits et devoirs seigneuriaux s'en réserve
toute-fois le dit seigneur tous droits de prélation rétention commis avantage
arrérages d'autres lodz et censives si point lui en sont dus sur ladite pièce".
La paix d'Alès signée le 27 juin 1629 et le paix de Nîmes du 10 juillet renvoient les troupes huguenotes de Rohan et celles de Louis XIII dans leur foyers. Les habitants soumis au devoir de logement des soldats respirent … la peste s'abat sur Nîmes de septembre 1629 à janvier 1630.
Le 13 juillet 1629 "quittance d'Anthoine Planol Charays du
lieu de Conchays paroisse des Salelles" Pierre Fustier de Langlade
reçoit cinquante livres d'Antoine Charaix en remboursement d'un emprunt.
Il s'agit peut-être du beau-frère d'Antoine et on trouve à nouveau le
nom de Planol barré.
Le 7 février 1631, Marie Folchier veuve de François Jallet se sent disposée à rejoindre
son époux. Elle lègue trois livres aux pauvres, cinquante livres à son fils
Pierre quand il aura vingt cinq
ans, cinquante livres à sa fille Marie, quarante livres à sa fille
Jeanne femme d'André Audibert de
Grays "item a aussi légué et donné par même
droit d'institution héréditaire que dessus à Jeanne Jallette aussi sa fille
naturelle et légitime femme de Pierre Fustier du lieu de Langlade outre sa dot
qu'elle lui a ci-devant constituée au contrat de son mariage la somme de cinq
sols et semblable légat fait aussi à tous et chacun autre de sa parentelle qui
prétendrait droit sur ses biens et à chacun d'eux qu'est de cinq sols et de
tous lesdits légats ladite testatrice fait de tous sesdits légataires vrais
héritiers particuliers à la charge de s'en contenter sans rien plus pouvoir
demander ni quereller sur ses biens à son héritière bas nommée et d'autant que
le chef et fondement de tout testament est de faire instituer un héritier ou
héritière à cette cause icelle testatrice en tous et chacun ses autres biens
droits noms actions meubles immeubles présents et avenir a fait instituer et
nommer de sa propre bouche son héritier universel" sa fille Françoise femme d'Antoine Charaix "disant ladite testatrice
que là est son dernier testament nuncupatif et dernière volonté nuncupative
et veut que vaille par droit de codicille ou donation à cause de mort ou par
tel autre droit que mieux pourra avoir valeur force et efficace cassant annulant
et révoquant tout autre précédent testament codicille ou donation à cause de
mort par elle ci-devant fait si point y en a".
Le 23 avril 1633, Claude Mombel de Grays,
"rentier des rentes et revenus que le sieur Delarque prend en la paroisse
des Salelles" reçoit d'Antoine Charaix, créditeur de Louis Jallet des Sabatiers
l'impôt sur la terre cultivée, "la censive qu'il doit audit sieur Delarque
et ce pour treize années dernières ce montant huit deniers chacune année".
Une bonne vieille prescription quinquennale, il faut trente ans à l'époque,
aurait fait gagner quelques sous à la famille. Combien a-t-il reçu, en livres,
sachant qu'une livre vaut vingt sous et un sou douze deniers ?
Le 10 février 1635, Pierre Meynier fils
de feu Estienne de La Pleysse de Malarce reçoit quarante
livres d'Antoine Charaix de Conchaix
en remboursement de la somme que lui prêta feu Symon Thomas dont Jeanne femme
dudit Meynier est la fille et l'héritière "et comme mari d'icelle a
réellement reçu dudit Planiol Charays ladite somme".
En 1640 les documents affluent à nouveau. Le
24 novembre, Antoine Charaix emprunte nonante livres à
Symon Cade de Palières de Gravières
pour acheter à Maurice Borrel des Borrels de Conchaix
"une pièce de terre contenant vigne et oliviers sise au terroir dudit
Conchays et au dessous le lieu des Moriers appelée Vignelongue autrement le
Fourniel qui confronte du pied avec le chemin dit des Salelles à Seyras"
pour deux cent vingt trois livres "prix juste et raisonnable de ladite
pièce ayant été fait à l'estimation du présent temps". Une loi, destinée
par le pouvoir central à protéger les biens fonciers des communautés rurales
contre l'appétit concentrateur croissant des seigneurs locaux et les investissements
fonciers des bourgeois urbains, laisse au sieur Borrel la possibilité d'annuler
la vente "si dans le temps et terme de cinq lundis complets et révolus
à compter d'aujourd'hui en hors ledit Borrel rend et paye audit Charays ladite
somme avec les légitimes décostements" "icelui Charays sera
tenu rendre et retourner audit Borrel ladite pièce sans aucune forme de justice
ni figure de procès et le présent contrat sera tenu comme pour non fait ni advenu".
Le 7 décembre
1640 Antoine Charaix qui est "malade de
son corps gisant dans son lit et par la grâce de dieu bien sain de mémoire et
entendement et considérant que n'y a au monde chose plus assurée que la mort
ni chose plus incertaine que l'heure d'icelle lequel se doutant d'en être surpris
et pour empêcher que après son décès entre ses enfants, parents et amis ne soient
débats, questions, procès et litiges en raison des biens que dieu lui a donné",
prend les dispositions suivantes. Il sera enterré aux Salelles,
on distribuera un cartal de blé seigle aux pauvres le jour de son enterrement
et un autre pour sa neuvaine, chacun de ses enfants Antoine, André, Jean, Jeanne, Marguerite, Marie "comme aussi au posthum
ou posthume que pourroyt ou pourroyte être dans le ventre de sadite femme au
cas icelle se trouverait en sainte" recevra cent livres quand il aura
atteint l'âge de valablement les recevoir ou quand il se mariera. Pour son fils
Antoine, il ajoute "quarante
cinq livres pour lui être baillées lors et tout incontinent qu'il le voudra
employer pour industrie ou apprentissage d'un état si veut et de plus ledit
testateur a ordonné que sadite femme soit tenue de tenir ledit Anthoine en tous
aux escoles pendant trois ans et lesdits André et Jean jusque à ce qu'ils auront
l'usage de savoir lire et écrire pour les servir à l'usage des états qu'ils
voudront apprendre" et à ces derniers "veut et ordonne que
trente six livres leur soit payées lorsque se mettront en apprentissage d'un
état qui leur soit agréable". Il donne cinquante livres à Marie Jallette sa belle-sœur à ajouter à
ses droits légitimes et nomme sa femme son héritière universelle "à
la charge de pouvoir jouir dudit héritage pendant sa vie et de remettre icelui
conjointement avec le sien à tel de leurs enfants légataires surnommés que bon
lui semblera" et "entend qu'elle ne soit tenue d'en rendre
jamais aucun compte à personne quiconque pourvu qu'elle ne se remarie point
car si elle était recherchée par celui qui sera élu héritier de rendre aucun
compte des fruits qu'elle aura perçu dés à présent lui lège et donne par légat
tous lesdits fruits de ses biens mais au contraire si elle vient à se remarier
veut que soit tenue d'en rendre compte des fruits qu'elle pourra avoir pris
et perçus si a" "d'autant que ses biens sont joints et unis
avec ceux de sadite femme et que ses entrées sont en arrentements tenures et
propriétés prix et primes toutes sortes défiantes de procéder aucun compte de
portion d'inventaire de sesdits biens s'en contient à la prudence de sadite
femme et au cas icelle de son propre mouvement y voudrait faire procéder dés
à présent ledit testateur à commis et commet l'a présent notaire royal sous
requis pour y procéder attestant deux de ses amis parents et voisins quand y
voudra commettre". Jacques Jallet est témoin. André Charaix, son aîné Antoine disparu, recueillera l'héritage
familial. Quant à Jean, il est peut-être l'un des
nombreux Jean Charaix dont j'ai relevé les actes
aux Assions, au Pradal, aux
Avols et ailleurs.
Si la santé d'Antoine Charaix est inquiétante - il meurt
en 1641 - la santé économique de la famille est prospère et Françoise Jallet, seule, en sera l'énergique
gérante.
Le pauvre Louis XIII, grand d'avoir su se faire petit, disparaît laissant la place au plus long règne de l'histoire de France qui commence, il est vrai, par une sacrée chienlit. La Fronde des grands revendique tous les plaisirs que l'évêque de Luçon leur avait quelque peu gâtés : oppression en tout genre, rapines, viols, destructions de récoltes. Ce n'est pas le moindre mérite de Louis XIV dit le grand que d'avoir enfermé tous ces pillards paillards dans les puantes turpitudes de son guignol versaillais. .../...